4. Amoinville



Je passe plusieurs jours à Amoinville au sein d’exploitations de grande culture dans la Beauce, entre structures d’irrigation, hangars frigorifiques, cabine de tracteur et champs divers, documentant les détails d’objets faisant plusieurs fois ma taille dans des environnements gigantesques.

Les contrastes sont saisissants : les champs forment une mer ridée où s’érigent les poteaux électriques ou le mât d’une éolienne. Les immenses structures d’irrigation en métal de plusieurs dizaines de mètres de long se révèlent mobiles. Les hangars de stockage maintiennent en leur sein une température de trente degrés inférieure à la chaleur estivale. Les tracteurs bardés de technologie, semi-autonomes en attendant de l’être complètement, tractent les arracheuses où travaillent des trieurs manuels.

Mon séjour à Amoinville a lieu au coeur du mois d’août. J’assiste à la précision du ballet des engins agricoles parcourant les champs en pleine période de récolte des pommes de terre.

































































































Pomme de terre


Gourmandine, calibre 35/55 mm



Je suis dans la cabine d’un tracteur Fendt vert qui parcourt par allers-retours réguliers le champ de pommes de terre. Son conducteur est co-gérant de l’exploitation. Tout en conduisant, il me décrit les enjeux de l’agriculture de précision en désignant l’écran du GPS qui optimise le trajet du tracteur avec une marge d’erreur de quinze centimètres. Plus discret au milieu des boîtiers de contrôle, un autre écran diffuse ce que capte une caméra à l’extérieur de la cabine et permet au conducteur d’ajuster sa vitesse. Elle filme la plate-forme rouge de l’arracheuse de pommes de terre arrimée à l’arrière du tracteur : un tapis roulant charriant un flot de petites pépites d’un jaune éclatant à peine atténué par la poussière du sol dont elles viennent d’être extraites. Les mains des trieurs plongent régulièrement dans le flot pour en extraire une motte, un caillou ou un tubercule amputé. Je décide de suivre le trajet de ces pommes de terre en documentant ce que je vois par la vidéo. Je pars du champ où elles ont poussé jusqu’au centre de tri les conditionnant en palox pour le stockage. De tapis en trémis et tamis, elles passeront du stade de tubercule végétal protéiforme dont la croissance a été stoppée par le broyage des feuilles, à celui de produit de consommation courante trié, rangé, calibré qui sera consommé à raison de 30 à 35 kg par Français et par an en moyenne.