Deathign

Des objets-rituels matérialisant la place de l’écrit dans le processus de deuil.


« Les morts ne le sont vraiment que lorsqu’on cesse de s’entretenir avec eux ; de les entretenir. (…) La charge de leur offrir plus d’existence nous revient. » 

Extraits d’Au bonheur des morts de Vincianne Despret

En diffusant un appel à témoignage à destination de personnes ayant perdu un proche.
Je découvre que du petit mot à la lettre, écrire est une pratique récurrente dans l‘acceptation du deuil et la matérialisation du lien avec la personne disparue.


I - Un contenant scellé



Sur le principe de la tirelire, le contenant scellé est le réceptacle des petites attentions quotidiennes que l’on porte au défunt. Le dessin de cet objet est à l’intersection de plusieurs objets existants: la tirelire, l’enveloppe, l’urne et la boîte aux lettres.
La place de cet objet est dans une bibliothèque, comme une présence discrète et intriguante.


C’est un patron en toile métallique dont la couture est faite de fil d’acier non traité. Plusieurs années après sa fabrication, ce contenant se descellera par l’oxydation naturelle de ce fil d’acier. Suffisamment longtemps après la disparition du proche pour que l’accès à ces traces papier soit l’occasion de comprendre son deuil plutôt que de le revivre.






II - Un rituel libérateur

Le deuxième objet est né de la rencontre avec une thérapeute qui accompagne des personnes dans le deuil. Elle fait écrire aux endeuillés des lettres successives dont la rédaction est émotionnellement très dure. La conclusion de la thérapie est la destruction de ces lettres par le feu.

Par défaut cette crémation se faisait avec les moyens du bord, dans un évier.



Je cherche à sublimer la destruction de ces lettres. Cet objet rituel est constitué d’un socle en cuivre poli, bombé et large pour recevoir de l’eau ; d’un brasero en laiton entretenant un jeu de reflets avec le cuivre; et d’un poids en fonte qui maintient la lettre pendant qu’elle brûle.
Ce dispositif de crémation est conçu pour rendre rassurant et sécurisé le fait de faire du feu en intérieur. C’est un dispositif rituel que le thérapeute conserverait dans son cabinet de travail, et qui n’est utilisé qu’au moment de conclure la thérapie.









I




II



La réalisation du dispositif de crémation a été l’occasion de collaborer avec un artisan-repousseur de l’entreprise Edmond Allain & successeurs, spécialisée dans le repoussage de métaux.







2015

Crédits Photos :

Véronique Huygue, Thibault Perrin